LE GENIE EUROPEEN...
J'avais, il y a bien longtemps, écrit un article sur le génie européen. L'Europe avait émergée, non pas malgré sa division, mais à cause d'elle.
Techniquement, l'affrontement des puissances européennes, fait que chacun innove, militairement d'abord, mais aussi, dans tous les autres domaines.
Le plus avancé, dans la civilisation européenne, ne le reste pas longtemps. Le challenger innove, change, prépare la "revanche", en analysant la défaite précédente, ses causes, ses racines, et change et améliore sa tactique et son armement, entrainant derrière lui, toute la machinerie industrielle et politique.
L'empire, lui, est satisfait de sa stagnation, qui correspond aussi à une rente et à la féodalité. On ne change jamais rien. Le seul inconvénient avec le plus grand empire, le plus ancien, c'est que, périodiquement, il s'effondre, quand craque une frontière que percent des barbares sales et dépenaillés, mais techniquement et militairement supérieurs. Et cela, tous les deux siècles, les empereurs chinois ne le voient pas venir.
Ils ont crée à l'arrière une société très inégale, qui n'a aucune envie de défendre l'ordre établi, et les forces impériales, encore considérables, se dissolvent en combattant à la foi barbares et insurgés. Ils n'ont plus d'arrières, et le moral s'effondre vite.
Tout empire signifie unification technique à l'échelle de l'empire, puis régression technique. Ne vous leurrez pas, c'est précisément ce qui est en train d'advenir de l'empire européen, qui met des années à vous dire ce qu'est le chocolat, ou la taille de la cuvette des WC.
Pourtant, on voit bien, en France, ce que donne la nucléocratie d'EDF. Elle a colonisé les hautes sphères de l'état, et l'on se retrouve coincé dans un choix technique vieux de 40 ans, que des vieux de 70 ne veulent absolument pas changer, parce que ce serait reconnaitre qu'ils sont stupides, et qu'ils perdraient leurs bonnes places.
Après, survient le déclin des techniques. Une fois l'unification faite, on ne recherchera qu'une seule chose, plus l'innovation, mais réduire les coûts. A tel point que lorsque les mongols voulurent envahir le Japon, les agents japonais soudoyèrent les chantiers navals, qui, à l'époque fabriquaient les meilleurs navires du monde. En les payant pour qu'ils construisent les navires beaucoup plus vites. Les mongols furent contents, les constructeurs aussi, les nippons aussi. Quand vinrent les typhons, toutes les petites astuces faites pour construire plus vite se chargèrent de détruire la flotte sino-mongole.
Au XIV° siècle, les chinois avaient des canons, ceux des européens étaient balbutiants. Au XIX°, les canons chinois n'avaient pas changé, mais les canons européens les massacraient sans même qu'ils puissent répliquer, ou sans qu'ils puissent même les atteindre. Lors de la prise d'Alger, ce fut le même problème. Les canons du fort l'empereur étaient incapables de rivaliser avec les français.
La colonisation Française de la fin du XIX° siècle dû tout à la pièce d'artillerie De Bange, dont la fabrication entraina la création d'une industrie. Les allemands, eux, colonisèrent avec la mitrailleuse maxim. La mitrailleuse maxim, elle même, fut le fruit de la terreur allemande devant les premières mitrailleuses françaises en 1870, où certains succès furent spectaculaires. Mais côté français, on ne vit que les inconvénients d'une arme trop nouvelle et pas très au point.
Cette course aux armements, fut la cause de l'innovation, de la recherche, et la concurrence, c'était ni plus, ni moins que l'avantage sur le champ de bataille. Chaque partie, essayant successivement de surpasser l'ennemi. Une fois la pièce de Bange dépassée, l'industrie française répliqua avec le 75, dont l'utilisation pendant la guerre des boxers donna des sueurs froides à l'état major allemand, qui exigea de Krupp la refonte de son 77, qui ne donna pas grand chose, mais qu'on espérait pallier, chez le kaiser par la prédominance de l'artillerie lourde.
De même, la création du canon de 88, fruit de l'impuissance constatée du 77, fut la clef, plus que le panzer, de la conquête allemande de l'Europe.
Cette innovation, elle est de tous les siècles. Aucun ne finit comme il a commencé. L'avantage éclatant au début d'une époque, devient archaïsme mortel à la fin de cette période.
De même, les progrès en masse de la médecine, de l'agriculture ont souvent été initiés pour des motifs de puissance. Pour faire mourir des soldats en masses sur le champ de bataille, il faut d'abord les élever à moindre coût. Le roi de Prusse, donc, généralisera de manière expéditive la pomme de terre dans ses états, même si ses sujets devront aussi apprendre comment la manger, souvent avec des déboires.
Si, quelque part en Europe, un état se fourvoie, par exemple la France du nucléaire, l'état voisin ne se sent pas obligé de se fourvoyer aussi, et surtout, le compromis politique ne l'engage pas. Le lobby nucléaire n'y a pas la même force. " la lourdeur des structures politiques menace aujourd’hui l’Europe de stagnation ". Elle ne menace pas, elle en est la cause. Elle établit un ordre social, qui ne souffre pas d'alternative. Et cet ordre social, décide de liquider toute innovation, qui remet en cause cet ordre social.
L'innovation existait dans la Chine ancienne, mais elle consistait à fabriquer des curiosités de laboratoire dont on admirait la technique, sans vouloir l'appliquer.