DE FAIT...
"Emmanuel Todd, qui est aussi un admirateur de Dimitri Orlov (il l'avait dit dans l'un de ses récentes conférences à propos des États-Unis), donne un cadre fondamental à la culture que sont les structures éducatives.
Elles sont restées intactes en Russie durant toute la période d'effondrement -certes avec les moyens du bord- et elles avaient de toute façon réalisé le travail d'éducation commune des masses dans la phase qui la précédait.
Tous ceux qui connaissent des russes entre quarante et cinquante ans doivent savoir à quoi je fais allusion, tant leur niveau d'éducation est visiblement supérieur à celui de leurs homologues français de la même génération.
Le poéte sibérien dont parle Orlov avait probablement lui aussi bénéficié de l'école soviétique.
Ce sont ces structures qui se sont d'abord effondrées aux USA et Todd fait remonter l'amorce du processus aux années soixante du siècle dernier.
Avec le paradoxe apparent qu'elles n'en produisaient pas moins toujours plus de diplômés, ce qui traduisait en fait une dévaluation générale des diplômes qui s'achève en naufrage aujourd'hui.
En France, le même processus s'est emballé dans la seconde moitié des années quatre vingt -avec la chimère des quatre vingt pour cent de réussite au bac d'une classe d'âge- et est en train de rejoindre le marasme absolu américain.
Concernant l'effondrement social, Orlov fait à mon avis une erreur, puisque -toujours en référence à Todd- ce dernier avait montré qu'il s'était déjà produit dans les années soixante dix, comme en témoignait le recul de la natalité et de l'espérance de vie, et cela alors que les sphères du pouvoir économique de la société donnaient encore une illusion de stabilité.
D'une manière générale, je pense que dans les processus d'effondrement le poisson commencent toujours par pourrir par la tête -suivant le célèbre adage chinois et pris ici au sens littéral- et que la dislocation frappe d'abord le champ culturel et social bien avant que les difficultés économiques ne soient visibles.
JH Kunstler lui aussi a montré combien le prélude obligé à la crise américaine avait été le "genre de vie banlieue" par ses effets délétères sur la mentalité collective.
Le mouvement dialectique des sociétés alors s'enclenche, tous les déterminismes économiques et socio-culturels se renvoyant sans cesse l'un à l'autre jusqu'à l'effondrement de l'ensemble."
De fait, dans les sociétés, il y a toujours un mouvement d'inertie. Les éduqués des générations précédentes ne disparaissent pas d'un coup, et il en reste -un reliquat- de très éduqués. Les effondrements, de fait, sont survenus tous ensembles.
Mais ils n'ont pas été visible de suite.
Un De Gaulle, qui, dans les années 1965 pensait que fort knox était vide, avait dressé ce constat.
Mais il n'y a pas que les réserves d'or. Le pic pétrolier, c'est 1971, la décision de rendre le dollar "as good as gold", c'est du 15 août 1971, le déficit commercial US commence en 1971, la déshérence du système éducatif, c'est de ces années là, aussi.
Comment créer un grand vide ? Simplement en envoyant et en donnant l'équivalent US du bac à tous, parce qu'ils ont coché la case "minorité opprimée". Après, cela métastase à toute la société et à tous, sauf ceux qui ont des structures familiales fortes, comme les asiatiques. De fait, le bachelier US est un quasi illettré. Le type vivant dans la bible belt est mieux éduqué. Il a appris à lire, écrire, compter, expliquer les textes, même si ce n'est que dans la bible.
Pour ce qui est des effets de l'effondrement, ils s'accroissent d'années en années. le déficit commercial, par exemple, n'était qu'une broutille en 1971. Pas de quoi s'inquiéter. Puis une un peu plus grosse broutille en 1972 et ainsi de suite.
Pour le système éducatif, je rappellerais la série "sur écoute". Les enfants sortent avec des déficits cognitifs importants, parce qu'on ne leur demande jamais de résultat, jamais de structure, et s'il y a autant d'abattus dans la rue par la police, c'est que la plupart des abattus sont simplement incapables d'obéir à un ordre simple, ou simplement, de le comprendre. Ils n'ont jamais été habitué à faire autre chose que ce qui leur chantait, incapable de se concentrer, même quelques secondes. Le régime carcéral en devient caricatural.
Un bac à 50 % de réussite ou moins, avait une valeur, 80 % devient une caricature, et 99 %, un torche cul. Mais celui qui a un portefeuille familial de connaissances, n'en a cure.
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