LUTTE DES CLASSES
Je me rappelle ce que disait une de mes profs, il y a bien longtemps. Elle enseignait les relations internationales.
Elle partait de la citation d'Audiard, "les cons, ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnait". Elle en faisait : "les cons, ça croit tout, c'est même à ça qu'on les reconnait".
La personne qui se veut un peu éclairée, et ne pas simplement faire le perroquet, se doit de se faire une position personnelle, et si possible, en confrontant les sources.
Chose facile à l'heure actuelle avec l'internet.
Pour en revenir aux retraités, et mon point de vue contesté, je vais vous faire part de ce que j'ai entendu :
- "On n'a pas besoin de partir à 62 ans, on peut travailler plus longtemps". Auteur, un retraité EDF, parti à 55.
- "Les chômeurs sont des feignants qui ne veulent pas travailler", "Moi, j'ai une bonne retraite parce que j'ai toujours travaillé". Auteur : femme retraitée, ayant eu une pré-retraite à 50 ans. Evidemment, sa propre période de chômage, 10 ans, ne rentre pas en ligne de compte. Sa sous cotisation aux caisses de retraites n'entre pas, non plus, en ligne de compte.
- "T'avais qu'à pas te faire virer". Auteur, retraité, pré-retraité à 50 ans, à son fils, licencié économique à 54 ans. Pas pré-retraité, lui, il avait simplement un salaire trop important, et trop de bouteille pour n'être pas en admiration devant son directeur.
- "On trouve pas de main d'oeuvre". : Auteur, chef d'entreprise, avec un cahier des charges long comme un bras. Le bras, pas d'humain, mais de chauve-souris. C'est à dire au moins trois fois plus long.
- "Les gens ne savent, veulent pas travailler". Auteur, chef d'entreprise dont le registre du personnel est d'une épaisseur telle qu'elle menace la survie des forêts. Il ne lui vient pas à l'idée qu'il a p'têt une réputation établie de pénible, perceptible à 100 km de rayon. En réalité, personne ne veut travailler pour lui... Il faut dire qu'en virant un type tous les deux jours, trois s'il est de bonne humeur, il y a mis de la bonne volonté.
Evidemment, j'ai constaté lors des manifestations, une grande partie de cheveux blancs, et j'ai constaté un fort clivage. Un fort clivage entre retraités qui trouve cette réforme répugnante, et retraités qui approuve bruyamment parce qu'il faut nous "sauver des défici " (sans T le déficit).
Comme je l'ai dit, le paumé de base, qui croit tout ce que dit la télé, sans recul, triplement quadruplement vacciné, Otanien en diable, tremblant devant l'arrivée de l'armée rouge, déjà détruite 6 fois. Comme le cadre parisien, il vit dans sa bulle. Bien entendu, ils n'ont pas compris qu'avec le krach bancaire actuel, la dette publique doublerait, et qu'on finirait simplement par monétiser la dette.
Petit rappel pour les néophytes ici. Si certains "ont travaillé toutes leur vies", ils oublient, souvent, de donner les paramètres. Les voici :
- D'abord, une natalité très base jusqu'en 1945. Les générations creuses ont eu l'opportunité de carrière, même si elles ont beaucoup travaillé, parce qu'ils étaient peu nombreux. Jusqu'à la génération 1959, l'insertion sur le marché du travail n'a pas posé de gros problèmes. J'ai d'ailleurs connu des gens, qui pour commencer une vie active, passaient une petite annonce. Et qui avaient l'embarras du choix. Ou, simplement, qu'on venait chercher parce qu'on savait qu'ils voulaient travailler. Et qui pouvaient changer d'emplois, plus souvent que de chemises (elles, elles étaient rares et chères).
- Ensuite, une grande disponibilité énergétique à bon marché jusqu'en 1973. L'économie, à l'heure actuelle, c'est faire fonctionner les machines, directement ou indirectement, même dans le tertiaire, totalement dépendant de celles-ci. Quand il y a moins d'énergie, un peu moins bon marché, on en fait fonctionner moins, et on crée le chômage. Et un chômage en constante augmentation.
Donc, si beaucoup de personnes ont réussi dans la vie, et n'ont pas simplement survécu, c'est parce que les conditions s'y prêtaient, pas pour leurs mérites personnels, si grands fussent ils.
Autre chose, l'intérim et la précarité. Impossible d'accéder, dans ces conditions, à un niveau suffisant de qualification, et désengagement réciproque. Le salarié n'entend pas attraper une hernie pour un contrat de 3 jours. L'employeur veut du jetable, ou plutôt voulait du jetable, jusqu'à ce qu'il épuise le vivier de main d'oeuvre.
Avec le départ des baby boumers en retraite, et l'arrivée de générations plus creuses et formées pour des métiers de corne-cul, on a effectivement une inadéquation. Mais la main d'oeuvre, c'est comme les stocks, ça ne se gère pas en flux tendus et juste à temps.
Donc, je répète, c'est dégoûtant et répugnant, pour un retraité d'être partisan, pour les autres, d'un allongement des durées de cotisations et le recul de l'âge, alors que, soi-même, on a profité d'un départ beaucoup plus précoce, dans de meilleurs conditions, après une vie, certes de travail mais dans des conditions sociaux économiques bien plus satisfaisantes.
On voit ici, la banalité du mal, ou plutôt, la banalité de la méchanceté, de la médisance, et du plaisir de faire mal...
Non, le plus de 65 ans, n'est pas collectivement, un con, comme certains ont cru le lire. Mais certains s'en donnent à coeur joie pour le devenir. Et je le répète, s'ils veulent augmenter la durée de travail, pour les autres, je leur suggère d'aller faire la différence, s'ils ne l'ont pas fait, déjà.
On peut noter aussi, un durcissement net des conditions de travail que n'ont pas connu beaucoup d'anciens. Les durées étaient plus longues, mais nettement moins intensives.
C'est donc, une logique de lutte des classes qui agite la société française, entre les macronistes, ceux qui pour l'instant, tout va bien, et les autres. Dans les macronistes, on a des cadres, et aussi, pas mal de retraités. Certains ont oublié, que, malgré leur pavillon/appartement, assurance vie, voiture et livret de caisse d'épargne, ils n'étaient que des prolos.