Cuba et son économie.
Bon, je me hasarde à une blague vaseuse ? Quel produit tropical Cuba ne produit pas ? Le cacao.
Quand on parle de Cuba, il ne faut jamais oublier la maxime américaine que "notre fils de pute" est toujours honorable, même si c'est un fils de pute, et que le
dictateur n'est à honnir que s'il ne vous obéi pas.
Vous avez bien compris le paradigme ?
Cuba, donc, découverte au début du 16° siècle est facilement conquise par les espagnols, et tout aussi vite dépeuplée par les épidémies.
Elle va rester vide et ne sert aux espagnols que comme plaque tournante, en direction des ressources essentielles : l'argent du Mexique, et l'argent du Pérou, via Panama.
Elle n'a d'ailleurs pu prendre cette place, qu'à la suite du déclin de Saint Domingue, ravagé par la guerre d'indépendance du cacique Henri, qui poussa à envisager son évacuation totale.
Elle était donc quasiment totalement extravertie, structurée par la flotte d'argent, et elle était quasi vide.
Un élevage extensif existait depuis le début du 16° siècle, mais au début 19°, il n'y a encore que 270 000 habitants, blancs, noirs et mulâtres.
La culture sucrière subit un boum à partir de 1791, et de la fuite des colons de Saint Domingue, et de certains de ses esclaves.
Le sucre devient très dominant, avec quelques cultures tropicales complémentaires (café).
Mais Cuba a toujours été politiquement compliqué. En gros, depuis 5 siècles, y règnent un bordel infâme.
Les anglais, qui conquirent l'île en 1762, y restèrent 9 mois, comprenant qu'il valait mieux -déjà- en partir.
La colonie resta espagnol jusqu'en 1898, ou elle fut conquise par les USA. Elle devint une colonie, puis accéda à une indépendance nominale, et à un esclavage économique totale, qu'on tenta de
masquer en faisant accéder à la présidence un métis, Batista.
On peut noter que la guerre avec les USA, commença de manière classique pour eux, par un grenouillage de première classe : l'explosion du Maine en rade de la Havane.
Cuba était en guerre depuis 1895, cette guerre succédant elle même à la guerre de 10 ans. L'une avait coûté 300 000 morts, et l'autre 200 000. La population n'atteignait pas alors les 2 millions.
Pour ne pas perdre la main, si les USA accordent l'indépendance formelle en 1902, l'amendement Platt lui permet d'intervenir militairement quand il lui plait. Ils ne s'en priveront d'ailleurs
pas, car leur poids dans l'économie du pays devient écrasant :
- 90 % des mines de nickel et des exploitations agricoles,
- 80 % des services publics. Ce qui n'était pas américain, était britannique.
Les dictatures commencent en 1921, et quand le dictateur apparait compromis, les USA le changent. Même comme on dit, c'est un fils de pute, mais c'est le notre.
Donc, en 1959, l'économie repose toujours à 80 % sur le sucre, et la Havane était réputée, précédent Las Vegas comme centre mafieux, avec ses casinos, ses prostituées, ses cadillacs.
Quand Castro accéde au pouvoir, mécaniquement, toutes les aspirations de la population vont à l'encontre de l'occupant économique, toute mesure de rééquilibrage se faisant à ses dépens.
Au pacte colonial espagnol, avait succédé un pacte colonial américain, le mot "pacte" étant trompeur, car il fait croire à un accord. Or, il n'y en avait aucun.
Comme l'économie reposait sur un seul pilier, le sucre, et accessoirement sur quelques autres ressources naturelles, peu peuplée, Cuba ne pouvait enclencher une politique de développement.
6 millions d'habitants, c'était la taille du Danemark, et c'est insuffisant pour être réellement autonome.
Cuba se raccrocha à L'URSS, mais la défaillance de celle-ci, si elle fut un rude coup, ne fut pas fatale.
Car, pour un pays sous développé, il y a quand même eu du grain à moudre :
"1- Le taux d’analphabétisme est de 0,2% à alors qu’il est de 11,7% en Amérique Latine
2- Le taux de mortalité infantile est de 6 pour 1000 contre 32 pour 1000 en Amérique Latine
3- L’espérance de vie est de 76,5 ans pour Cuba contre 70 ans en Amérique Latine
4- Le taux de scolarisation dans l’enseignement primaire est de 99% contre 92% en Amérique Latine
5- Les soins et l’éducation sont gratuits
6- Il y a deux fois plus de médecins à Cuba qu’en Angleterre sachant que la population en Angleterre est quatre fois supérieure.
7- Cuba compte plus de 4 millions d’étudiants sur 11 millions d’habitants, 15000 médecins exercent bénévolement dans plus d’une centaine de pays du tiers monde et 41000 étudiants étrangers ont pu poursuivre des études de médecines à titre gratuit à Cuba."
On peut d'ailleurs presque parler de la constitution d'un secteur économique de la santé.
D'ailleurs, pour beaucoup de ménages US, européens, c'est désormais presqu'un modèle :
logement abordable, santé gratuite, éducation de bon niveau et gratuite.
L'économie de marché, a, quand à elle, fait preuve de sa supériorité absolue : logement qui coûte la peau du cul, santé si on a de la chance, éducation de merde et hors de prix.
Là aussi, l'espérance de vie dépasse celle des USA.
D'ailleurs, l'attitude des USA, vis-à-vis de Cuba est plus celle du caractériel obstiné, arc bouté sur ses certitudes, et imperméable à toute raison, continuant une politique, par habitude.
Bien sûr, la majorité des cubains aimeraient sans doute un peu de neuf, mais la vraie opposition interne, celle qui n'est pas subventionnée par la CIA, sait très bien que la "libéralisation de l'économie" impliquerait certaines conséquences dont ils ne veulent pas :
- coût de la santé inabordable,
- coût du logement, pareil,
- frais de scolarité à l'américaine,
- dégradation de la qualité de l'enseignement, etc... Le tout, bien entendu, avec une forte augmentation des inégalités, le retour des émigrés, agressifs et qui ne
connaissent plus Cuba (certains sont partis depuis plus de 50 ans).
En outre, la spécialisation productive cubaine ne varierait pas beaucoup : ça resterait le sucre.
Il reste que Les Castro ont sans doute commis une faute économico-politique grave.
Ils ont refusés de produire de l'éthanol de Canne à sucre.
Si, moralement, cette position est honorable, elle est économiquement déplorable.
En effet, pouvoir disposer d'une concurrence de débouchés aurait beaucoup aidé l'économie cubaine.
Il vaut mieux alimenter la voiture des riches que l'estomac des pauvres. Et surtout, l'île est loin d'être entièrement cultivée.
Sans doute la population rêve t'elle d'autre chose aussi. Mais ce qui la maintient derrière le régime, pas le futur néo-libéral qu'on lui rêve à Washington...
Ce futur, les cubains l'ont a proximité. C'est Haïti.
TINA, pour le moment.
"Quand un cyclone fait 3000 morts à Haïti, il en fait 300 en Floride et 3 à Cuba"...